
Nous déambulions dans un décor d’opérette et même, au sein du monde de Dame Tartine…Passementerie toute en couleurs, dentelles, petits miroirs et fils d’or…
En vérité, je ne voyage pas, moi, pour atteindre un endroit précis, mais pour marcher : simple plaisir de voyager.
Les maisons Bohras
J’avais déjà vu des photos des maisons Bohras, si typiques de Sidhpur. Mais j’avais hâte de les voir « en vrai », et je n’ai pas été déçu. Ma mauvaise humeur et mon air morose eurent tôt fait de disparaître.
En nous promenant dans ces rues absolument désertes, nous avions l’impression de déambuler dans un décor d’opérette et même d’avoir pénétré d’un coup de baguette magique au sein du monde de Dame Tartine. Tout y était :
Le chocolat… noir… ou… au lait
Et même les rubans de pastilles…
…dans la boutique de Tasneeen
Mon amie Nicole, rencontrée sur un forum de voyageurs, m’avait indiqué cette échoppe de passementerie toute en couleurs, dentelles, petits miroirs et fils d’or, alors qu’elle voyageait avec un autre chauffeur, ami du nôtre, qui nous avait envoyé ce dernier pour nous conduire à travers le Gujarat…
Mais comme le collègue de Rajesh avait omis de lui parler de cette boutique, il ignorait tout autant que nous où elle se trouvait. Quelle déception ! Tandis que nous nous égayions dans la ville en nougat, pralines et chocolats il était parti à la recherche d’une échoppe qui pourrait correspondre.
Hélas, quand nous nous sommes retrouvés, plus d’une heure et demie plus tard, il m’annonça, tout joyeux :
– Ça a été laborieux ! Personne ne connaissait cette Tasneen… Finalement je l’ai trouvée… Mais… C’était fermé !
Nouvelle déception. Je notais au passage l’enthousiasme très indien de Rajesh pour avoir déniché la boutique, mais délaissant l’aspect négatif de la nouvelle qu’il annonçait : elle était fermée…
En fait, il avait demandé partout « about Tasneen shop », sans avoir compris de quel genre de boutique il s’agissait. Je ne lui avais donné aucune explication pensant qu’il appellerait son ami chauffeur qui, lui, la connaissait. Manifestement il n’avait aucune idée de ce que je cherchais.
J’ai ouvert mon ordinateur, me suis connecté tant bien que mal sur internet, suis allé sur ce forum de voyageurs et j’ai ouvert le carnet de Nicole pour lui montrer les rubans. Eureka ! Il comprit aussitôt. Il savait où trouver ces boutiques, toutes situées au même endroit ! Mais elles étaient également fermées. Il nous apprit qu’au Gujarat la plupart des magasins ferment entre 13h30 et 16h. « For lunch and… sleep »
Troisième déception !!!
Nous voilà donc partis à l’improbable recherche de cette boutique, un peu le nez au vent. Par Nicole, je la savais si minuscule, que l’on croirait un placard.
Finalement nous en apercevons une encore ouverte. Et voilà Rajesh parti au grand trot avant que la marchande ne ferme elle aussi. Et quand je m’approchai de l’espèce de « boutique-fenêtre-entrée-devanture-vitrine », qui vis-je s’y encadrer ? La fameuse Tasneen que je reconnus immédiatement ainsi que sa mère, grâce aux photos du carnet de voyage de Nicole !!!
Tout le monde se demanda ce qu’il m’arrivait, quand je m’exclamai bruyamment : « Mais c’est elle que je cherche ! Je la reconnais ! »
Evidemment, la dame fut ravie, particulièrement volubile dans son accueil plus que chaleureux… Elle nous expliqua que sa boutique était connue au nom de Fatima (sa mère) et non au sien propre. C’est pourquoi personne ne put renseigner Rajesh.
« Nicole » fut le « sésame » de cette caverne d’Ali Baba, dans laquelle foisonnaient rubans et galons, plus splendides et spectaculaires les uns que les autres.
J’expliquai à Tasneen que je cherchais ces somptueux rubans pour les offrir à ma fille.
J’en suis parti avec quatorze exemplaires différents pour vint-sept mètres et 1450 roupies au total. Un cadeau, à ce prix !
Tasneen ne tarissait pas de commentaires joyeux à chaque nouvelle bobine choisie : your daughter will be very happy !
Nous étions tous happy !!! Ma fille le serait certainement, mais moi aussi je l’étais d’avoir réussi à faire mes achats, Rajesh aussi de l’avoir trouvée, et elle encore davantage pour avoir fait d’excellentes affaires.
Seul, Tom, restait immuablement dans sa bulle, silencieux, fermé, comme extérieur et indifférent à l’hilarité générale et à tout ce qui venait de se passer.
Le temple de Rudra Mahalaya
Pour achever notre visite de Sidhpur, je demandai à Rajesh de nous conduire au temple Rudra Mahalaya – en ruines -. Il n’en connaissait ni l’emplacement ni même l’existence.
Il s’agit d’un temple du Xème siècle remanié au XIIème. C’était un magnifique temple à plusieurs étages avec 11 sanctuaires subsidiaires, dédié à EkadasaRudras (les 11 formes de Shiva).
Le temple était à l’époque, d’une grande somptuosité, avec un shikhara (clocher) de trois étages, 1600 piliers, 12 portes d’entrée, un vaste mandapa (hall) central, des porches sur trois côtés : au nord, au sud, à l’est, et à l’ouest, un sanctuaire.
Les ruines de ce grand édifice révèlent quelques sanctuaires subsidiaires, une torana, deux porches et quatre piliers du temple principal, des colonnes colossales superbement sculptées, des architraves massives et des arches de torana. Rudra-mala était l’un des monuments religieux les plus vastes et les plus somptueusement décorés d’Inde, au milieu du XIIe siècle.
Ce temple était absolument superbe. Gratuit, mais particulièrement bien gardé, non par des civils, mais par des policiers – ou des militaires -.
Alors que je prenais mon temps, comme d’habitude, pour examiner les détails architecturaux et faire de nombreuses photos, un des cerbères du temple s’avança et me pria poliment de m’en aller.
– Maintenant, ça suffit, tu dois t’en aller. Tu es resté assez longtemps.
Je m’apprêtais à protester – Pourquoi ? – Mais Tom qui connaît ma propension à la contestation, quand je ne comprends pas certains interdits, me fit signe de me taire, de ne pas discuter et d’obtempérer.
Tandis que je traînaillais à faire encore quelques dernières photos, le policier revint et me pria toujours aussi aimablement, mais très fermement, de sortir. Comme je ne comprenais pas pourquoi je devais sortir, je m’en étonnais auprès de lui. Celui-ci nous expliqua que ce temple ne se visitait pas.
Ce temple est fermé au public, déclara-t-il. Il est sous haute protection car il est menacé de démolition ou de dégradations par des musulmans. Ces derniers en revendiquent la propriété en tant que mosquée, pour des raisons historiques, sans tenir compte du fait qu’il s’agit bel et bien d’un temple hindou et que ce sont les musulmans qui l’ont profané, en partie démoli, et en ont usurpé la propriété pour en faire une mosquée. Il précisa qu’il ne m’en avait pas chassé tout d’abord par égard au touriste occidental que j’étais mais que je ne devais pas m’attarder sinon il aurait des ennuis lui-même.
Tu as eu de la chance d’avoir pu prendre des photos du temple. J’en ai une ou deux, volées et à la volée donc mauvaises car les gardiens militaires ne me lâchaient pas d’une semelle.
Bien contente que tu aies pu trouver la boutique de Tasneen. C’est incroyable ce qu’elle regorge de trésors sur un si petit espace
Bonjour Nicole, merci pour ton commentaire et je suis désolé de le valider et répondre un peu tard.