Détesté Tanjore, bruyante, stressante…temple Brihadīswara somptueux. Adoré Trichy. Temple Sri Ranganathaswami, religion/mercantilisme. Eglise N.D. Lourdes…
La vie sans religion est une vie sans principe, et une vie sans principe est comme un bateau sans gouvernail.
Je déteste Tanjore
Malgré toutes les merveilles architecturales que j’admire ici, je déteste Tanjore.
Après avoir visité Kumbakonam, Darhasuram et Gangaicongacholapuram, je découvre Thanjavur – l’autre nom de Tanjore -, la ville la plus bruyante – bien plus que Bangalore -, la plus stressante, la plus chaude depuis mon arrivée en Inde il y a déjà trois semaines. Et ici les gens présentent un visage rébarbatif, on ne voit pas les sourires fleurir partout sur les visages comme je l’ai constaté jusqu’alors.
Déjà trois semaines ? Ou seulement trois semaines ? Il me semble que je suis dans ce pays depuis des mois.
Le temple de Brihadisvara
Heureusement qu’il y a ce temple fabuleux où je passe quatre heures à le visiter. Fantastique ! L’extérieur est magnifique, mais l’intérieur est somptueux.
Au coucher du soleil la lumière est féérique. Les touristes et pèlerins indiens arborent une tenue en adéquation avec ce lieu sacré, surtout les femmes avec leurs saris éclatants et chamarrés, et les hommes torse nu et en dhotis immaculés. Mais les occidentaux avec leurs shorts, leurs bobs et leurs casquettes vissés sur la tête, déparent dans ce tableau et en rompent l’harmonie.
Je leur mettrais des claques à ces vieux avec leurs remarques idiotes du style :
– Ganesh, il ne craint pas le cholestérol parce qu’il aime les bonbons, les gâteaux, les douceurs…
Et leurs vieilles de ricaner, trouvant ça très drôle.
Nuisances sonores
Tout à Tanjore est incroyablement bruyant ! Je suis réveillé à minuit par le ronflement de moteur d’avion du ventilateur qui s’est subitement mis en route je ne sais par quel mystère. Des Indiens braillent dans la chambre voisine à minuit et demi…
De nouvelles vociférations dans les couloirs de l’hôtel et à l’extérieur me tirent de mon lit aux aurores. Ayant très mal dormi, je sors comme un somnambule, fatigué, en colère. Qu’est-ce que je fais ici dans cette ville de fous ?
Ambiance chaotique, mais paix intérieure
Le soleil n’est même pas levé. Je me dirige directement vers le temple. C’est fabuleux ! Il n’y a pas un seul touriste, mais, déjà, des groupes de pèlerins vêtus de couleurs vives, se bousculent à l’entrée, souriants, très affables… Cependant, c’est chacun pour soi. Aucun sens civique. Ils n’hésitent pas à se bousculer sans se soucier les uns des autres. Ils font leurs prières, leurs dévotions, dans un charivari effroyable, en vociférant, chamboulant tout sur leur passage.
Cependant, dans cette ambiance chaotique, je retrouve enfin ma paix intérieure.
J’aperçois au loin une vaste galerie ouverte dont le mur est entièrement recouvert de magnifiques fresques qui passent inaperçues aux yeux de tous les visiteurs qu’ils soient Indiens ou touristes
Le palais et la vieille ville
Plus tard, dans la journée, la visite du palais et d’un dédale de petites rues dans la vieille ville, pas très loin de ce dernier, escorté par une bande d’écoliers qui ne me lâchent pas, finissent par rétablir mon euphorie et ma bonne humeur. Il était temps !
Si je n’ai pas aimé Tanjore, j’adore Trichy (Tiruchirappalli)
Une mauvaise surprise m’attend à mon arrivée à Trichy : L’hôtel que j’avais sélectionné est complet, le deuxième complet, le troisième complet, le quatrième complet, le cinquième complet ! Et puis l’accueil n’est vraiment pas aimable !
J’ai laissé partir le rickshaw qui m’avait conduit jusqu’au premier hôtel et je traîne ma valise, à pied, d’hôtel en hôtel, et partout je reçois la même réponse : « full ». Je commence à être complètement paniqué. Où vais-je pouvoir dormir cette nuit ?
Le jour des mariages
Un autre rickshaw, plutôt gentil celui-là, m’aborde en m’expliquant que les hôtels sont complets à cause d’une fête – C’est ce que je comprends -. Nous sommes à la veille de « Republic Day », l’une des trois Fêtes Nationales de l’Inde.
Mais je ne vois pas trop le rapport avec les hôtels bondés. Je comprendrai beaucoup plus tard, à mes dépens, après deux ou trois autres expériences identiques qu’il ne faut jamais arriver dans une ville un samedi ou un dimanche, jours des mariages, sans avoir réservé une chambre au préalable !
On y célèbre des dizaines de mariages. Les centaines d’invités, par mariage, arrivent de toute l’Inde pour y participer, ce qui totalise des milliers de personnes qui débarquent dans la ville, toutes en même temps, envahissant les hôtels.
Un lit impeccable pour des pieds qui ne le sont pas
Mes pas se portent vers un grand bâtiment aux très nombreuses chambres, qui fait grand genre. Je m’attends à payer assez cher. Or, on me montre une chambre immense, très jolie, confortable, très lumineuse, aux sanitaires impeccables. Les draps semblent propres, mais quand j’ouvre le lit, je m’aperçois que celui du dessous n’a pas été changé : il a manifestement hébergé d’autres pieds. On s’en aperçoit vite à cet endroit du drap. Si la plupart des Indiens font une grande toilette le matin, ce n’est apparemment pas le cas le soir. Les traces sont plus que visibles. On cache la misère en mettant un drap propre, bien repassé, sur le dessus, mais on ne change pas celui du dessous. J’éclate de rire. Pas grave, je dormirai sur celui du dessus et je me couvrirai avec mon drap-sac.
J’apprendrai l’Inde de jour en jour au cours de mes voyages.
J’aime beaucoup Trichy
Je me demande où sont allés – ou plutôt ne sont pas allés – les voyageurs et les auteurs de guides qui décrivent cette ville sans aucun intérêt. Je la trouve au contraire très agréable. Animée et agitée, certes, mais pas du tout oppressante, des gens souriants partout, beaucoup moins de bruit et de saleté qu’à Tanjore. Les ressentis sont vraiment subjectifs.
Le Sri Ranganathaswami temple
L’après-midi je me fais conduire au Sri Ranganathaswami temple.
J’y découvre avec intérêt une pratique religieuse grouillante. Une fois de plus un peu hystérique. Ils arrivent par cars de pèlerins entiers, ils courent tout le temps, ils crient, ils gesticulent, ils sont complètement excités, ils se bousculent, ils gueulent en permanence, même à l’intérieur du Saint des Saints, ils font leurs dévotions devant chaque statue, déposent leurs lampes à ghee, et moins de dix minutes plus tard les voilà dehors. Ils sont contents, ils ont visité le temple.
L’architecture, les statues, les sculptures superbes, ils n’en ont rien à faire. C’est une foule qui va, qui vient et n’arrête pas. Ils se moquent pas mal d’autrui. Je suis bousculé, malmené, mais ce n’est pas grave, je commence à m’y habituer. Je les prends comme ils sont. Ils sont chez eux et c’est à moi de me plier à leurs règles et à m’adapter à leur comportement. Ou alors je rentre chez moi et je n’y reviens plus…
Religion et mercantilisme
A l’intérieur du temple même, je découvre de nombreuses boutiques de bondieuseries. Je pense à la fureur de Jésus avec les marchands du temple.
Il faut payer cinquante roupies pour entrer. C’est la première fois que je dois payer pour pénétrer dans un temple. Désormais je circule pieds nus. Je ne garde plus les chaussettes que je portais au début de mon voyage. J’ai vite compris qu’il était plus facile de se laver les pieds que ses chaussettes. Et puis, peu à peu, j’abandonne mes principes de voyageur novice en Inde. J’oublie les poncifs colportés un peu partout sur l’hygiène et les risques de maladie.
L’église Notre Dame de Lourdes
La surprenante église Notre Dame de Lourdes, de style néo-gothique, ne manque pas de charme avec ses très beaux vitraux, ses statues de Christ, de Vierge Marie et de saints très kitch. Même Jeanne d’Arc se trouve ici ! Comme à Pondichéry, comme je le verrai partout en Inde, nul banc, nul siège ne se trouve ici. Ce qui rend la nef encore plus immense. On s’assoit par terre, à l’indienne.
Promenade au hasard des rues
Sachant que je ne risque pas de me perdre – un rickshaw pouvant me reconduire à tout moment à mon hôtel -, je pars au hasard des rues. Un vrai bonheur en parcourant ces venelles grouillantes de piétons autant que de véhicules divers. Un éléphant, même, déambule là au milieu des voitures, des cycles, des rickshaws, sans le moindre embarras ni des uns ni des autres, ni… de l’éléphant lui-même.